«Un voyage commence au rayon guides de la librairie»
Si vous partez en voyage, peut-être emportez-vous un guide. Routard, Lonely Planet, Petit Futé: l’offre est importante. Les premiers guides datent de la Grèce ancienne. Le livre dirigé par Claude Reichler et l’historienne Ariane Devanthéry permet de voir les atouts et écueils des guides.
Le voyage se fait désormais avec un compagnon essentiel: le smartphone. Et pourtant, les guides ont toujours la cote, comme le rappelle l’historienne Ariane Devanthéry: «Il n’y a qu’à voir la variété et le nombre de guides qu’il y a dans les librairies. C’est un segment très important.»
Les premiers guides remontent à la Grèce ancienne, avec «La Périégèse» de Pausanias. «C’est un texte qui permet de faire le tour de la Grèce» explique l’historienne.
«Entre les recettes de cuisine et l’encyclopédie»
La forme moderne du guide est née en même temps que le tourisme, car «au 18e, les gens voyageaient avec des récits de voyage qui avaient été neutralisés, par exemple pour le Grand Tour. Ils utilisaient le récit d’un autre voyageur pour faire le même voyage. Dès le 19e, ces récits-guides n’ont plus satisfait les voyageurs.» Vers 1830-1840, la forme se stabilise avec les guides «Joanne» devenus guides bleus par la suite.
Pour Ariane Devanthéry, le guide de voyage, est «entre les recettes de cuisine et l’encyclopédie. Il est didactique, et l’on en ressort grandi en ayant appris sur la culture ou l’histoire du lieu. Un guide doit permettre à un tas de personnes de réaliser leur propre voyage. C’est un multitude de voyages à venir».
«Instrument d’aveuglement»
Pourtant, le guide de voyage ne fait pas l’unanimité. Roland Barthes dit du guide que c’est un «instrument d’aveuglement». L’écrivain suisse contemporain Blaise Hofmann, lui même grand voyageur, l’a en horreur: «On a beau soutenir crânement que les guides ne servent qu’à savoir où ne pas aller... on les achète. On en achète même parfois deux, pour comparer. Pis, au retour, on les aligne, avec tous les autres, sur une étagère ostensible, comme des trophées de chasse, comme la preuve irréfutable du chemin parcouru.»
Ariane Devanthéry n’est pas aussi catégorique: «Je ne suis pas aussi opposée au guide que Hofmann ou Barthes. C’est à nous de ne pas se laisser utiliser par les guides. Il faut que chacun trouve celui qui lui corresponde.»
L’historienne elle-même, voyage avec cet outil dans son sac: « Tout voyage commence pour moi au rayon des guides de la librairie...»