Me Thomas Barth: «C’est une affaire d’État»
L’avocat des familles des victimes du drame de l’Arve dénonce des responsabilités à tous les échelons, «des incongruités absolues» et un manque de considération de la part des SIG.
«C’est extrêmement poignant et touchant.» Ému après la diffusion de nos révélations sur les conclusions de l’enquête de police, Me Thomas Barth a voulu, deux ans après le drame de l’Arve, rendre hommage aux victimes qu’il qualifie de héros.
«Pour les familles des victimes, ce fut très difficile de lire ce dossier, de constater ces négligences sur de nombreuses années, ajoute-t-il. Ce ne sont pas une ou deux négligences, mais des dizaines qui, empilées les unes aux autres, ont donné lieu à ce drame.»
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L’avocat dénonce un «manque de considération» de la part des SIG, bien qu’une enquête pénale implique que les parties ne s’adressent pas la parole. «Pour l’instant, à part une lettre manuscrite quelques jours après le drame, plus rien. Le silence complet. Pas une boîte de chocolats à Noël. Le néant.» Les familles sont en colère contre l’attitude passive du fournisseur d’électricité. «Sans empiéter sur les responsabilités des uns et des autres, c’est le travail de la justice, il y aurait une façon de faire bien différente de la part de cette entreprise publique et peut-être même du Conseil d’État», glisse-t-il.
Dans cette affaire, c’est la régie publique qui est inculpée et non pas des responsabilités individuelles. Une situation rare, selon l’avocat des familles des victimes. «On le fait quand il y a une somme de négligences, un défaut d’organisation, qui conduisent à penser que c’est l’entreprise elle-même qui est responsable de ce qui s’est produit. C’est la réflexion tout à fait sensée du Procureur général Olivier Jornot. (…) Cela n’exclut pas, par la suite, des responsabilités individuelles. La loi permet de mettre en prévention une entreprise et ensuite, si nécessaire, de mettre en prévention des personnes physiques. Je pense que cela pourrait arriver dans un avenir proche.»
Négligences: «Ça prêterait presque à rire si cela n’était pas aussi tragique»
Pour l’avocat, l’absence de réaction face aux négligences rapportées par des employés à leurs supérieurs est problématique. «On voit des ordinateurs qui ne sont pas réparés, on voit une climatisation qui ne fonctionne pas, on voit des incongruités absolues. Ça prêterait presque à rire si cela n’était pas aussi tragique.»
Ce drame est-il une nouvelle affaire Adeline? «C’est une affaire d’État, répond Me Thomas Barth. Elle met en cause une entreprise publique très importante, à tous les échelons. Il y a des responsabilités certainement à différents niveaux. Au Procureur général de faire la lumière.»
En attendant l’ouverture d'un procès, les familles des victimes attendent «la vérité» ainsi qu’une reconnaissance de responsabilité de la part des SIG. «Cela aurait dû venir depuis un moment. On n’effacera pas ce qui s’est passé, on n’effacera pas ces deux années (…), mais on espère que cette reconnaissance de responsabilité viendra le plus vite possible.» L’avocat des familles espère également que la régie publique ne «(se) dédouanera pas en rejetant la responsabilité sur le fabricant par exemple, car cela serait un coup de plus porté aux victimes et à leur famille.» Pour l’heure, la justice doit continuer son travail et la présomption d’innocence est de rigueur.
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