Genève

François Paychère: «On ne nous a jamais dit que tous ces problèmes étaient résolus»

16.12.2024 20h22 Rédaction

Mis en cause par Nathalie Fontanet et le Conseil d’État, François Paychère, magistrat à la Cour des comptes, défend son audit sur les mandats externes et critique les réactions politiques.

Mis en cause par le Conseil d’État et plus particulièrement par sa présidente Nathalie Fontanet, le magistrat de la Cour des Comptes François Paychère se défend. Face aux accusations d’un «travail biaisé», il dénonce une attaque injustifiée: «Si je devais laisser un héritage, ce serait à mes enfants, pas à Madame Fontanet, tranche-t-il. Lorsqu’on n’a rien à dire à propos du message, on tire sur le messager.» Il rappelle que ce rapport n’est pas l’œuvre d’un seul homme, mais le fruit d’un travail collégial, délibéré par trois magistrats, contrôlé par un magistrat qualité et réalisé par une équipe de quatre personnes. 

Lire aussi: La vaste gabegie des mandats externes de l’État

Interrogé sur la colère du Conseil d’État, François Paychère rejette toute responsabilité. «Je ne suis pas psychologue», dit-il ironiquement, tout en regrettant que l’exécutif ait préféré organiser «son contre-feu» plutôt que de participer au débat, comme il en avait l’occasion lors des conférences de presse de la Cour des comptes. Quant aux propos des «dernières cartouches», il assure qu’il s’agissait d’une plaisanterie. «Je n’ai pas le même sens de l’humour que la personne concernée», tacle-t-il.

Nathalie Fontanet avait estimé que le rapport arrivait après la résolution des cas problématiques. Une affirmation que le magistrat réfute catégoriquement. Il rappelle que des discussions avaient eu lieu dès juin avec les directions financières concernées, puis en septembre et octobre, pour signaler les lacunes identifiées. «On ne nous a jamais dit que tous ces problèmes étaient résolus, souligne-t-il. C’est un miracle que tous les problèmes aient disparu entre ce matin avec la présentation du rapport et ce midi.»

«La Cour demande simplement d’appliquer les règles que le Conseil d’État s’est données à lui-même»

L’un des points de tension concerne les recommandations de la Cour des comptes, perçues par certains comme une volonté d’accroître la bureaucratie. François Paychère clarifie: «La Cour ne demande pas plus de contrôle, elle demande simplement d’appliquer les règles que le Conseil d’État s’est données à lui-même.» Soit à travers des directives internes ou transversales. Selon lui, un règlement général des achats simplifierait ces procédures. Une idée déjà proposée en 2013 et acceptée à l’époque par le gouvernement.

Lire aussi: Audit sur les mandats externes: ces exemples surprenants

Concernant les risques pour les PME locales, souvent évoqués lorsqu’il s’agit de marchés publics, François Paychère rappelle que les règles qui régissent ces marchés sont issues d’accords intercantonaux, que Genève, comme les autres cantons, s’est engagé à respecter. « Si le canton veut faire autrement, c’est une décision politique », tranche-t-il.

La suite sera politique

Enfin, François Paychère pointe une différence majeure entre les travaux de la Cour des comptes et ceux du Service d’audit interne (SAI). Si les conclusions du SAI sont proches de celles de la Cour, elles restent confidentielles, contrairement aux recommandations de la Cour, qui sont publiques et dont le suivi l’est tout autant. «Cela laisse une zone de doute», observe-t-il.

Alors que le Conseil d’État semble refuser l’essentiel des recommandations, François Paychère rappelle les limites de l’action de la Cour. «Nous sommes là pour conseiller, pour suggérer. Nous n’avons pas les moyens d’obliger l’État à agir», regrette-t-il. Seul le Grand Conseil pourrait, s’il le souhaite, légiférer pour encadrer plus clairement les processus d’achats dans le canton.