Genève

Écoutes illégales: le Grand Conseil saisi pour élire les procureurs extraordinaires

11.11.2022 17h42 Rédaction

Me Meier a demandé au président du parlement cantonal de mettre à l’ordre du jour de la prochaine session l’élection des procureurs extraordinaires. L'avocat est notre invité.

Depuis lundi, le monde judiciaire genevois est secoué par l’affaire des écoutes illégales. En 2014, dans le cadre de l’affaire des constructions fantôme, la Brigade financière a enregistré et écouté plusieurs échanges entre les prévenus et leurs avocats. Les actuels avocats des promoteurs ont demandé la récusation de la procureure, Caroline Babel Casutt. Ils l’accusent d’avoir utilisé les écoutes du dossier parallèle pour instruire l’affaire. La procureure a, de son côté, réfuté toute consultation de ces écoutes. Elle a également expliqué que «tout a été fait dans les règles de l’art.» Le président de la Chambre pénale d’appel a décidé de suspendre le procès. 

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Mardi, les différentes parties ont conclu un accord concernant le volet civil: les prévenus se sont engagés à rembourser toutes les victimes des promoteurs y compris une trentaine de plaignants oubliés en première instance. Mais les écoutes sont au cœur de l’actualité, provoquant des réactions fortes chez les avocats. La classe politique a vivement commenté l’affaire. Le député Sormanni (MCG) a saisi ce mercredi 9 novembre le Conseil supérieur de la magistrature, demandant l’ouverture d’une enquête indépendante.

Des magistrats hors canton 

Cinq jours après le début du scandale, nouveau rebondissement. L’avocat Me Nicola Meier a adressé ce vendredi 11 novembre un courrier à Jean-Luc Forni, président du Grand Conseil. L’avocat demande au Grand Conseil de porter à l’ordre du jour de sa prochaine session l’élection des quatre procureurs extraordinaires prévus par la nouvelle Loi sur l’organisation judiciaire, entrée en vigueur en août 2022. En effet, l’interpellation de l’avocat illustre que cette loi n’est pas encore pleinement déployée. «Cette interpellation vise à mobiliser le Grand Conseil et ses députés, puisque c’est de leur charge d’élire ces quatre procureurs», explique sur notre plateau l’avocat.

Ce n’est qu'à l’issue de ces élections que le Conseil supérieur de la magistrature pourrait confier l’affaire dite des écoutes à l’un d'eux. Pour être éligibles, ces magistrats doivent être encore en activité et exercer dans un autre canton que celui de Genève. Le Grand Conseil doit se réunir les 24 et 25 novembre prochains.

Les enquêteurs visés par une demande de récusation

La demande de récusation lancée par les avocats vis-à-vis de la procureure est toujours en cours d'examen, indique Me Meier. «Elle a été transmise à la Chambre pénale des recours. La procureure visée par la requête doit se prononcer, puis on recevra ses observations», explique l’avocat. Il confirme par ailleurs avoir fait une requête de récusation vis-à-vis des inspecteurs de la Brigade financière. Les enquêtes depuis 2014 pourraient être annulées et les charges en découlant, abandonnées.

Quoi qu'il en soit, cette affaire marque un tournant dans notre système judiciaire: «La procédure (des écoutes, NDLR) n’est assurément plus la bonne et elle devra être revue de fond en comble, y compris la procédure de contrôle», glisse Me Meier.